In extremis

C’est paradoxal. Ou peut-être est-ce normal. Je ne sais pas.

Je m’explique.
J’ai une furieuse (mais alors vraiment !) envie d’écrire à nouveau dans ce blog.
Ca ne trompe pas, ça me fait comme au début : je fais quelque chose, je pense à un truc, j’entends un machin, et paf !, je me dis : « Tiens, ça, faut absolument que j’en fasse un billet ! ».

Tout le monde est d’accord, c’est une preuve.

Et pourtant, quand je m’installe devant mon traitement de texte, c’est le néant qui règne entre mes deux oreilles : je suis incapable d’aligner trois phrases qui reflèteraient ce dont je veux parler, je me perds en circonvolutions qui me perdent moi-même, bref, déjà que j’étais loin d’être le nouveau Dostoïevski, mais là, comme dirait l’autre, I’m not half the man I used to be vu que je frôle le niveau zéro de l’expression écrite …

Mais bon, peut-être est-ce normal : voilà plus d’un an que je n’ai pas écrit, justement (et quand je dis écrit, c’est autre chose qu’une citation ou qu’un « en vrac »), et sans doute la machine se grippe-t-elle si on ne s’en sert pas assez souvent.

J’ai d’autres théories (que justement, je n’arrive pas à mettre en mots) qui se rapportent à la sclérose de l’imagination, au passage à l’état adulte et à l’étouffement quasi-inconscient de ces carburants introspectifs que sont les bleus-à-l’âme, étouffement qui parait tellement indispensable à une vie rangée, lobotomisée, sans risques, sans dérapage, sans douleur …

Mais bon, pour continuer sur ce thème, ces déchirures que l’on recouvre et que l’on enfouie bien profond, auxquelles on interdit de remonter, elles restent bien vivantes, affleurant parfois notre conscience et titillant certains de nos réflexes.

Depuis trois ans, c’est la situation que je vis par rapport à ce blog qui en devient une boite de Pandore.
D’un côté, une envie sincère de l’alimenter parce que c’est le seul vecteur d’extériorisation que je me connaisse, et de l’autre, la crainte de relancer la machine à penser, celle dont l’effet secondaire est de mettre en évidence la merde ambiante face à laquelle on ne peut rien, et qui neurasthénise à force de nous renvoyer notre impuissance à la face.

Et puis, il y a quelques semaines, j’ai reçu un mail, tout gentil, un mail qui prend des nouvelles, qui s’inquiète, mais qui, va savoir pourquoi, a fissuré suffisamment les protections mises en place pour que je prenne mon clavier aujourd’hui (sans compter le fustigeant billet du Maître :) )

Alors bon, je ne sais pas. On verra bien.

Mais même dans le pire des cas, j’aurais réussi à poster quelque chose en 2010, in extremis.

Commentaires

1. Le mercredi, octobre 20 2010, 17:27 par Khaos Farbauti Ibn Oblivion

Une petite astuce de la part d'un aussi ancien blogueur que toi, on a tendance à s'enfermer dans des modèles et des schémas de billet (autant sur le fond que la forme) et parfois cela en devient aussi un frein à l'écriture.

Donc j'ai envie de dire : aux chiottes la formulation, la cohérence, la pertinence, la ligne éditoriale, l'intérêt, l'intellectualisation, ... parfois écrire, n'importe quoi, n'importe comment, suffit.

L'important c'est le lien avec les lecteurs. Non ?

2. Le mercredi, octobre 20 2010, 18:00 par Solita

Je suis complètement d'accord avec Khaos. J'ai moi même fait exploser une dizaine de blogs, parce soit j'avais l'impression de me contredire, soit d'être nulle et n'avoir plus rien à dire, soit parce que je piquais la mouche soit......
Finalement je me suis dis qu'il fallait que je travaille mon ego et que je lui fasse fermer sa bouche un peu!
Nous sommes des paradoxes, c'est humain, ça fait chié mais en même temps qu'est-ce que c'est bon on peut se permettre de dire caca boudin ;-)
Chui contente contente contente que tu sois là; espèce de sale gaucho! :-)

3. Le mercredi, octobre 20 2010, 21:17 par Izusa lakota

Je suis ravie de te lire de nouveau, ça fait drôlement plaisir, je suis comme toi confrontée face au même problème... écrire pour extérioriser mais se relire nous replonge dans le même abysse, quel biais choisir extérioriser et savoir analyser ou bin refouler et faire comme si on oublait, pour ma part je n'ai pas encore la réponse malgré mon envie d'écrire...
Anway, bon retour parmi nous !

4. Le vendredi, octobre 22 2010, 19:00 par Zizanie

Juste : enfin !

5. Le samedi, octobre 23 2010, 14:35 par KannTo

Coucou les gens, vous êtes décidément des perles. Mais ce que je pense de vous se situe dans la dédicace qui suit ce billet :)

Khaos > Je suis d'accord avec toi : se cantonner à un modèle et/ou une forme de billet, ça paralyse. Mais de là à envoyer aux chiottes la formulation et la cohérence, il y a une marge ^^ . Quant à la pertinence, la ligne éditoriale, l'intérêt, l'intellectualisation, je ne me sens pas concerné :D

Solita > et ben alors, je le revendique : CACA BOUDIN ! :D . Pis d'abord, même pas vrai, je suis même pas sale :)

Izusa lakota > Je n'ai pas la réponse non plus. Là, je suis plutôt dans l'envie et le fait de répondre à cette envie ... Advienne ce qui pourra dans ma tête :) !

Zizanie > *fait un deuxième bâton en sautillant de joie* oui, et ben, ne nous réjouissons pas trop vite quand même, hein ... :) . Et tant que tu es là, ton dernier billet est juste magnifique, ne serait-ce que dans sa conclusion (en tout cas, il me parle très fort).

6. Le mercredi, novembre 10 2010, 09:29 par Chrys'

Je rêve ou je viens bien de lire des articles de Kannto en cette "fraîche" année 2010...? Bin d'après le style...non je ne rêve pas...Mouarf!!
Bienvenue parmi nous, toi!

L'envie de continuer ou non un blog, je me suis moi aussi posée la question. Quant à la pertinence des effets exutoires...C'est exutoire en effet, cependant, je pense aussi qu'il y a un effet "schizophrénique" bien dérangeant...J'ai créé un nouveau blog, il y a peu, mais j'y vais peu. Si je viens ici c'est uniquement pour prendre des nouvelles des CopainsBlogueurs qui ,pour certains, ont participé à certaines de mes écorchures.
Nous ne nous "connaissons" pas, c'est vrai, c'est un paradoxe, mais j'aurai toujours une pensée pour eux, pour la sincérité de leur gentillesse et pour l'amitié dont ils ont fait preuve.

A bientôt Kannto.