Tiens, de l'eau, dans mes yeux ...

Ais-je déjà parlé sérieusement de mon VDD, et de ma formation ? Non, je ne pense pas.

Je suis assistant social (ou plutôt, assistant de service social, c'est ce qui est écrit sur mon zoli diplôme d'il y a presque 10 ans).

J'ai pédalé en VDI dans le domaine de la protection des ch'titsenfantsplutôtpassuperbienavecleursparents, où j'intervenais à domicile et où je m'en suis pris un peu trop en pleine poire pour ne pas me vautrer dans une forme de refus de cet emploi qui m'a mené (ou l'inverse) vers une gentille dépression dont je paye encore les conséquences.

J'ai pédalé quelques temps dans le domaine des sans-abris, où, paradoxalement, c'était pas si dur que ça pour le travailleur social : ça peut paraitre ignoble à dire, mais quand tout est cassé dans la vie de quelqu'un (et être sans domicile, je n'imaginais même pas le dixième de l'impact que ça avait sur un individu), c'est plus facile, t'as tout à réparer et t'as les coudées franche pour l'aider à se remobiliser (surtout quand ton chef de service est un fou furieux qui a passé sept ans de sa vie à batir un réseau partenarial d'hébergement d'urgence qui roule du tonnerre de dieu). Et ne croyez pas un "vieux" souvenir médiatique sur le sujet : tout ce qui a été dit, tout support confondu, sur le sujet, ne couvrait pas le 100ème de la réalité d'une journée sur le terrain (tant pour les principaux concernés que pour les structures et les travailleurs sociaux).

J'ai laissé tomber ce boulot pour un autre que me proposait une collectivité territoriale (genre, t'hésites pas, même si c'est un VDD encore).
Et c'est cet autre qui me pousse à écrire ce billet.

Actuellement, je pédale en faveur des gens qui dysfonctionnent du corps ou de la tête (ou des deux), qui ont besoin d'un lit super confortable vu qu'ils y passent, littéralement, leur vie, ou d'un chouette fauteuil qu'on peut faire rouler (mais pas pour s'amuser, juste parce que leurs jambes ne vont plus, quand ils en ont encore), ou encore de la présence constante de quelqu'un à leur coté, sinon, ils se mettent en danger, ou s'étouffent dans leur non-expectoration, ou meurent de faim devant le repas qu'ils ne peuvent pas porter à leur bouche, ou risquent des trucs pas cool par infection d'escarres (liste non-exhaustive).

*Note : je circonvole et prend ce ton badin juste pour ne pas me faire référencer sur les mots clefs de mon boulot, pas pour me moquer, bien sûr*

Et bref, toujours est-il que pour la première fois, après une après-midi d'entretiens (où je n'ai rencontré que deux personnes, t'imagines !), ben j'ai toutpleinfort les boules, même que j'ai dû faire deux fois diversion avec des photocopies pour ne pas me mettre à pleurer comme une madeleine sur les situations qui m'étaient expliquées, par des gens d'un courage, d'une dignité et d'une force morale que je ne m'autorise même pas à réver.

Inutile de rentrer aujourd'hui dans le détail : je n'en ai pas la force, et pas le temps.

Et je saute d'ailleurs de suite à la conclusion : on n'a jamais idée de comment la vie peut être, parfois, la pire des putes ...

Commentaires

1. Le mardi, août 21 2007, 20:14 par solita

Ah oui c'est vrai ça! Et même super pute! Allez viens là faire un calin avec ta popine.

2. Le mercredi, août 22 2007, 00:49 par KannTo

Oh oui, je le prend, le calin ...

3. Le mercredi, août 22 2007, 03:04 par Nickie

C'est fou, je ne te voyais pas dans ce genre de boulot... Pas par manque de capacité, au contraire.

Mais je t'ai toujours perçu comme un homme hyper sensible, soucieux de la condition humaine. Et ce genre de boulot peut vous mettre de ce fait, dans le 14e sous-sol...

Et chuis bien d'accord avec ta dernière phrase... La meilleure des douces ou la pire des putes...

Bises à toi mon grand ...

4. Le mercredi, août 22 2007, 10:21 par KannTo

Voilà qui est gentil, Nickie, merci :). Mais dans quel genre de boulot me voyais-tu oO ?

5. Le mercredi, août 22 2007, 10:42 par pkdille

Je fais beaucoup de bénévolat dans ce domaine (je fais beaucoup de bénévolat tout court d'ailleurs), mais je n'ai jamais voulu en faire un métier, je crois que je ne suis pas assez forte, j'ai tendance à confondre un peu trop l'empathie et la sympathie, et je me laisserais bouffer. J'ai la plus profonde admiration pour ceux qui réussissent à surmonter leur sensibilité pour se mettre au service des autres.

6. Le mercredi, août 22 2007, 11:19 par sandokan

On ne realise pas pleinement les coacs de la vie que quand l'un de ses proches ou personellement est touché. C'est pour cette raison que je fais partie de l'association UDAPEI et que j'aide autant que je peux (art-thérapie etc...). Courage, je sais oh combien ton metier est difficile et ingrat

7. Le mercredi, août 22 2007, 11:47 par KannTo

Bravo à vous deux ! C'est le bénévolat que je trouve admirable : c'est un vrai don de soi que l'on fait aux autres.

La sensibilité, il ne faut pas la surmonter, il faut l'utiliser (et ça, ça n'est pas admirable ^^) pour aider les autres et se trouver en empathie. Quand au fait de se faire bouffer, ben je pense que c'est pas possible autrement, sinon on ne se donne pas à fond pour les autres. Le piège (dans lequel je suis tombé il y quelques années) c'est de penser qu'on doit résoudre tous les problèmes des gens que l'on rencontre et tout charger sur ses épaules.

Quand à la difficulté du métier, tout est relatif : les professionnels travaillant en structures sont, d'après moi, extrèmement sollicités sur le plan moral. Et non, par contre, il n'est pas ingrat (parce que sinon, crois-moi, je ne le ferai pas ^^)(Pis le gras, c'est moi :-D )

8. Le mercredi, août 22 2007, 12:44 par tsuki_c

c'est énorme d'avoir déjà réalisé qu'il ne fallait pas prendre les problèmes des autres sur tes épaules ! comme tu dis ta sensibilité faut t'en servir pas la subir ! il faut tirer des leçon de courage de tous ces gens qui ont moins de chances que d'autres... généralement, en plus, ils ne veulent pas de pitié, ça ne leur apporte rien ça ! ils méritent mieux ! en tout cas, c'est courageux quand même de faire ce travail, beaucoup préfèrent faire l'autruche face au malheur des autres !

9. Le mercredi, août 22 2007, 15:53 par KannTo

Faire l'autruche face au malheur des autres, c'est une autre façon de dire qu'on ne sait pas comment les aider, ou que ces malheurs font trop écho pour qu'on puisse en sortir indemme, non ? Bien sûr, il y a toujours des "égoistes", mais ça prend racine dans les histoires perso, d'après moi ...

Je ne suis pas convaincu qu'il soit possible de tirer des leçons de courage pour soi des drames des autres. En tout cas, pour ma part, je n'y arrive pas. En revanche, c'est clair que pour relativiser tes petits bobos à l'âme ou au corps, il n'y a pas mieux !
L'autre écueil est de pouvoir continuer à entendre, aider et rassurer ceux qui se plaignent de bobos "moindres", soit, en d'autres termes, de ne pas hiérarchiser moralement les maux de chacun ... sinon, tu oublies des souffrances, et ça, c'est terrible ...

La pitié ne sert à rien si elle n'est pas moteur de quelque chose d'autre, et les gens ont "leur fierté". Mais parfois, tout à fait légitimement, cette "pitié" est un préalable pour s'autoriser à être aider ... (comme parfois, le préalable est la confrontation ...).

Pis c'est pas du courage, nanméo ! ^^

10. Le mercredi, août 22 2007, 16:25 par tsuki_c

pour ma part, je reste persuadée qu'on peut tirer leçon du courage des autres, j'en suis la preuve, si je n'avais pas su tirer de leçon du courage de ma mère très tôt, je ne serai pas là pour en parler... savoir voir le courage des autres c'est accepter qu'il y a de l'espoir et que si certains peuvent le voir, on le peut tous... ce qui peut toutefois permettre de reste capable découter les "petits bobos" c'est d'ignorer le passif des gens et de se dire qu'on ne sait jamais pourquoi quelqu'un prend plus à coeur une chose qu'une autre, il faut en effet rester capable d'accepter les différences de sensibilité des gens...

et pisque j'te dis que c du courage quand même nanméo !!! :-p

11. Le mercredi, août 22 2007, 18:28 par KannTo

^^ je pense que la relation mère/fille joue pour beaucoup et qu'on est peut-être plus dans le domaine de l'éducation ... mais je ne pense pas que ça joue pareillement avec des gens que l'on ne connais que depuis une heure ...

Et je persiste à prétendre qu'il n'y a aucun courage à faire quelque chose qu'on aime faire ^^ (nanméo ! :-D )

12. Le mercredi, août 22 2007, 19:21 par tsuki_c

ok j'ai pas choisi le bon exemple avec ma mère mais je t'assure que ça marche pourvu qu'on soit réceptif...

et :-p nanméo !

13. Le mercredi, août 22 2007, 21:51 par KannTo

:-)