Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?

Il faut-être constamment à l'affut des petite manifestations du désordre (tant qu'il ne s'agit pas de bruler des ambassades, de tuer des gens ou de regarder les émissions de julien courbet (il s'agit d'ailleurs ici d'un désordre mental)).
Ces manifestations nous rappellent que rien n'est immuable et qu'il y a toujours des exceptions. Ne vous attendez pas à du fracassant : juste une petite manifestation du désordre, rafraichissante ...

Cet après-midi, je donnais la becquée à P'tit Coeur et à P'tit Bout d'Acier à l'heure dite du goûter.
Respectant la sacro-sainte parole du Pédiatre (vous noterez la majuscule, on a les religions que l'on veut), je propose à mon petit dernier une compote, suivie de biscuit boudoir (deux, pas plus).

S'ensuit une brève consternation en constatant que la boite en cours est vide+1, et qu'il me faut en entamer une nouvelle. Je reprend donc mes esprits comme tout père responsable, et éventre proprement une consœur d'étal de l'indélicate qui me fait perdre mon temps à se vider sans qu'on s'en rende compte (j'ai une théorie sur les victuailles présentes à l'instant t et incompréhensiblement absentes à l'instant t+1).
Au dedans, je trouve, comme à l'habitude, trois sachets renfermant un alignement ennuyeux de dix boudoirs (biscuit par ailleurs intrinsèquement ennuyeux, que même que les Pédiatres avec leur p majuscules, ils en profitent que ces pauvres petits ne connaissent pas encore le nutella pour leur coller des machins sans goût au goûter).

Mais je m'égare.

Car c'est à cet instant que se produit la petite manifestation du désordre:

Le biscuit rebelle
Vous ne remarquez rien ?
Malgré le nombre, de toute évidence important, d'ingénieurs qui a conçu la chaîne de fabrication de ce produit en utilisant des sciences parfaites (mathématiques et physique) connues pour l'intransigeance de la rectitude de leurs résultats (ah ben oui, c'est pas "peut-être" en maths; et pour les tatillons, la physique quantique n'a rien à voir dans la fabrication des boudoirs), malgré la règle de base de marketting qui veut que la qualité du produit soit constante, il y a, en cinquième position, un biscuit qui est à l'envers dans le sachet.

Voilà.

C'est beau.

C'est peut-être la seule boite au monde qui contenait un tel phénomène.
Bon, ceci dit, P'tit Bout d'Acier, il en a rien à cirer des délires de son père; ça ne l'empêchera pas de lui faire sa fête à cet original, non mais !(P'tit Bout d'Acier conçoit ses rapports avec les représentants du monde des biscuits comme une nécessité d'extermination, de préférence par ingestion, mais il ne crache pas sur un écrabouillage en bonne et due forme).
D'autant que Ma Blonde n'adhérera pas à un projet de sauvegarde du sachet miraculeux qui coute des sous, faut pas déconner non plus.
Enfin, ma tentative pour intéresser P'tit Coeur à ma découverte s'est soldé par un échec cuisant, "Dora" gagnant par ipon dans le combat des sujets à devenir ou à rester centre d'intérêt dans les préoccupations de ma fille.

C'est pas grave, j'entretiendrai sa mémoire, à ce brave petit biscuit qui aura parfumé mon après-midi d'une senteur de rebellion ...

Commentaires

1. Le mercredi, février 15 2006, 08:04 par arille

hallucinant. Un jour, mon fils (il peut témoigner) a trouvé dans un paquet de six petits sous paquets de craquottes au chocolat un septième paquet ! Oh joie !

2. Le mercredi, février 15 2006, 09:23 par Khaos Farbauti Ibn Oblivion

Tu n'imagines pas tout ce que ce biscuit à l'envers me remémore.

Je n'ai certes jamais travaillé dans une fabrique de biscuit mais j'ai eu une longue et traumatisante expérience dans une fabrique de madeleine (de marque très connue)

Outre le fait que l'usine était déplorablement sale, que quel que soit l'emballage final (qualité ou économique) les mêmes madeleines se retrouvait à l'intérieur, tu apprendras que la disposition des madeleines dans leur barquette est en réalité réalisé A LA MAIN (en l'occurrence, les miennes à l'époque) et que la chaîne va fort vite.

Si le fonctionnement est le même, il est donc possible que ce biscuit retourné a valu une réprimande sévère à un pauvre travailleur précaire et que les biscuits adjacents contiennent diverses traces d'huiles et d'hydrocarbures.

Ah et il peut y avoir des traces de sang aussi (je ne m'étendrais pas sur le sujet mais dans les madeleines de l'époque il y en avait...)

3. Le mercredi, février 15 2006, 13:25 par Nickie

Ahhhhhhhhh.... C'est ici, dans ce genre d'exercice, que l'on sépare les verbilleurs des talentueux du verbe. Réussir à pondre un texte aussi long, le sujet de départ étant aussi simple qu'un biscuit, et réussir à ce que le lecteur se rende non seulement jusqu'au bout mais.... termine sa lecture avec un beau grand sourire!!!!

Bonne journée avec tes chérubins!

4. Le jeudi, février 16 2006, 01:55 par KannTo

Arille > Et voilà, encore une manifestation du désordre (ça fait du bien, hein ?) ;-) . Ceci dit, matériellement parlant, j'aurais préféré qu'il y eut onze biscuits plutôt que dix ... même si le gain est minime, et que j'y perd en poésie, rien que pour le principe ...

Khaos > Uh, ne serait-ce pas un stage ouvrier de première année d'ingénieur ?
Sinon, je trouve mesquin de ta part de tenter de me gacher ce petit plaisir : ce pourrait donc être la résultante d'une erreur humaine ?!!? Et pas la manifestation d'une force farceuse qui nous rappellerait que, dès qu'elle le veut, elle nous pourrit toute notre belle société de consommation ?!!? Je suis déçu :o).
Toutefois, de vieux restes intuitifs de mon bref passage dans un monde étrange appelé "cursus post-bac scientifique et technologique" me laissent accroire que ce genre de biscuit serait fort idéalement traité par une brave chaîne automatisée.
Je vais essayer d'enquêter ...
Si j'ai tort, j'aurai une pensée pour le pauvre travailleur précaire ... et si j'ai raison, j'en aurai une pour les dizaines de chômeurs que la sus-mentionnée chaîne prive d'un épanouissant labeur.
Enfin, après le billet où j'évoquais en conclusion ce que je souhaite transmettre à mes rejetons, je suis fort marri d'apprendre que je les empoisonne, potentiellement, mais avec amour ... J'ai d'ailleurs aussitôt formellement interdit l'achat et la consommation de madeleine sous mon toit, crime désormais passible d'un appel téléphonique aux services de l'Aide Sociale à l'Enfance (soit, dans l'inconscient collectif, la DASS) pour un placement en urgence :-)

Nickie > Que voilà un dithyrambique propos qui me touche beaucoup, bien qu'il me paraisse illégitime ! Bah, ça n'est qu'un délire, pour rire (mais ça me touche quand même) :-). Il y a, par ici, un appréciable et talentueux exemple de lecture fondamentalement inutile mais profondemment jouissive (en tout cas, pour mes synapses). Oui, je sais, je ne peux m'empêcher de me répéter quand j'aime quelque chose ... je le ferai plus ! ;-)
A bientôt !

5. Le jeudi, février 16 2006, 09:24 par Khaos Farbauti Ibn Oblivion

Mille pardons pour le plaisir gaché (mais mon expérience ne concernant que les madeleines, le boudoir ne subit peut-être pas le même traitement)

Pour information ce n'est pas le moins du monde mon stage ouvrier (qui, lui, se déroula beaucoup plus paisiblement dans un anonyme service après vente informatique) mais plutôt d'un exemple d'éducation parentale à valeur ajoutée, selon ce bon vieux principe universel qui dit qu'on ne peut prétendre au très haut de l'échelle sans avoir d'abord vécu le très bas.